jeudi 27 octobre 2011

LA POESIE, LE SLAM, LES HAÏKUS - Christine de Pizan

Christine de Pizan
écrivant dans sa chambre
Christine de Pizan et son fils

Christine de Pizan
présentant ses Epîtres du Débat

Christine de Pizan (1364 - 1430) écrit dans une société qui réserve aux hommes tous les pouvoirs. Défendant la cause "féministe", se mêlant de politique, de science et de morale, elle nous a surtout laissé des poèmes déchirants où elle raconte ses amours perdues. Les miniatures qui ornent ses manuscrits la représentent à son pupitre, pâle, gracieuse, absorbée par l'étude et l'écriture. Elle aime par-dessus tout se retirer dans la solitude de son scriptorium, cette fameuse "chambre à soi" que Virginia Woolf revendiquera plus tard, sans laquelle il ne peut y avoir de création. En cette fin de XIVème siècle, où le livre est un luxe, Christine de Pizan compose ses ouvrages pour les princes. Puis elle les offre en grande cérémonie à ses nobles mécènes, qui lui procurent en échange écus et renommée.

Mariée à l'âge de quinze ans à Etienne du Castel, notaire du roi, elle aime son mari choisi par son père. Ils ont trois enfants et vivent heureux pendant dix ans, jusqu'à la mort d'Etienne. Elle demeure seule, ayant à charge sa mère, sa fille, ses deux garçons et une nièce recueillie par la famille. Christine de Pizan s'invente alors une vie singulière.

Elle entre en littérature par la poésie. Elle compose rondeaux, ballades et virelais. Ses plus beaux vers scandent la douleur et les regrets amers. Elle ose affronter l'Université, alors fermée aux femmes, dans la "querelle littéraire du Roman de la Rose" : dans la suite qu'il donne au premier Roman de la Rose, poème courtois de Guillaume de Lorris, le poète Jean de Meung professe en effet le mépris du genre féminin. Il est soutenu par ses pairs érudits mais Christine de Pizan trouve les mots justes et ardents pour désarmer ses adversaires.

En ce début de XVème siècle, le royaume est déchiré par la guerre civile entre armagnacs et bourguignons, Charles VI est en proie à la folie et les Anglais envahissent le pays. Le climat est si meurtrier à Paris que Christine de Pizan finit par renoncer à prêcher la sagesse. Elle se retire en l'abbaye de Poissy où demeure sa fille, et se tait pendant onze années. Elle ne sort de son mutisme que pour chanter les louanges d'une jeune fille de seize ans venue sur les marches de Lorraine pour libérer Orléans assiégée par les Anglais. Christine de Pizan meurt après avoir composé son Dictié de Jeanne d'Arc. Elle n'assistera pas au procès de la Pucelle, condamnée pour sorcellerie par ces mêmes universitaires qu'elle a combattus.

Longtemps ignorée, on la redécouvre au XIXème siècle lorsque le romantisme s'abreuve aux sources gothiques mais non sans misogynie. On réédite aujourd'hui une partie des oeuvres politiques de Christine de Pizan.

(cf Magazine Muse - Avril 2007)

Seulette suis et seulette veux être,
Seulette m'a mon doux ami laissée,
Seulette suis sans compagnon ni maître,
Seulette suis, dolente et courroucée,
Seulette suis en langueur malmenée,
Seulette suis plus que tout autre égarée,
Seulette suis sans ami demeurée,
Seulette suis à huis ou à fenêtre,
Seulette suis en un angle cachée,
Seulette suis pour rassasier de pleurs,
Seulette suis, dolente ou apaisée,
Seulette suis, rien n'est qui tant me sied.

Extrait de "Ballade", tiré de Mon coeur qui est maître de moi,
de Christine de Pizan et Charles d'Orléans


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